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Corps contraint, corps colonisé, corps magnifié… Du 12 au 15 octobre 2023, Somerset House met à l’honneur, plutôt sagement, l’individu noir, toutes positions et représentations confondues.

Un corps comme en apesanteur qui se dégage d’un ciel saturé de couleurs pâles, où l’on distingue un soleil blanc et des dizaines de corps flottant dans des positions étranges : l’œuvre, présentée par la 193 Gallery, s’intitule Seul face au monde. Signée par l’artiste ivoirien Pascal Konan, elle est visible jusqu’au 15 octobre à Somerset House (Londres), où se tient la onzième édition de la foire d’art contemporain africain 1-54 (62 exposants, 170 artistes) créée par la Marocaine Touria El-Glaoui.

Représentations à l’infini

Quelles que soient leur spécificité et leur amplitude, les foires d’art sont, partout dans le monde, d’éphémères états des lieux de la création. Si leur vocation est essentiellement commerciale, elles permettent néanmoins d’entrapercevoir les préoccupations, les angoisses, les espoirs d’une partie de l’humanité à un instant précis. La tendance qui se dégageait l’année dernière avec une forte présence de « black portraits » semble s’être considérablement amplifiée cette année. L’œuvre de Pascal Konan, qui montre un corps à la fois soutenu par la communauté des autres corps et séparé d’eux, pourrait en être un symbole.

Le corps, et plus précisément le corps noir, est la figure centrale qui revient sans cesse dans la majorité des galeries exposantes de cette édition d’1-54. Corps de femmes, corps d’hommes, corps entiers, corps amputés, corps colonisés, corps assumés, corps transformés, corps magnifiés, corps contraints, corps quotidiens, il serait possible de prolonger la liste à l’infini tant il y a de manières de représenter notre enveloppe charnelle. D’autant que les artistes contemporains ne s’interdisent aucun média : si la peinture domine largement, le corps est aussi abordé par la photographie, le collage, le tissage, le dessin et, plus rarement, la sculpture. Certains n’hésitent pas à mélanger les moyens d’expression, la broderie s’invitant souvent dans la peinture, et la peinture elle-même n’hésitant pas à s’imposer à la photographie.

Effet de rattrapage

Sans doute faut-il voir dans cette abondance de corps réalistes un effet de mode – le succès commercial de peintres comme la Britannique Lynette Yiadom-Boakye ou le Ghanéen Amoako Boaffo ayant peut-être inspiré certains créateurs.

Sans doute faut-il y voir, aussi, un effet de rattrapage. Pendant des années, le corps noir a été exclu d’une histoire de l’art dominée par l’Occident. Pour le moins, placé à sa périphérie, tantôt sujet subalterne, tantôt projection exotisante et érotisante d’artistes occidentaux voyageurs, comme l’a bien montré l’exposition Le modèle noir de Géricault à Matisse au Musée d’Orsay, à Paris, en 2019. Désormais, avec force et détermination, l’individu noir n’est plus objet mais sujet, il s’affirme et clame fièrement son existence.

Rendre le regard

Présenté par la galerie Éric Dupont, le Béninois Roméo Mivekannin se place dans cette perspective avec sa série sur les « modèles de l’histoire de l’art ». Reprenant des toiles célèbres de l’histoire comme Le repos des modèles (1905) de Felix Vallotton, ou Janissaire et Eunuque (1876) de Benjamin Constant, l’artiste les réinterprète à sa manière en redonnant un regard à ceux qui en ont été privés.

« Souvent, ces toiles sont des projections de l’Occident sur l’Orient, et les Africains qui y sont représentés ne jouent qu’un second rôle, dit-il. Me sentant souvent à la fois d’ici et d’ailleurs, j’ai voulu raconter une contre-histoire, montrer la construction du cliché. » Aux corps qu’il peint d’après des modèles anciens, il a souvent donné son propre visage. « Ce sont pour la plupart des autoportraits, il y a quelque chose de moi dans le regard, explique-t-il. J’essaye de donner à voir un regard plutôt qu’un corps dominé. »

Femmes indigo

Ce genre de regard, où s’expriment la fierté, l’indépendance, la liberté, les doutes parfois, nombre de peintres le cherchent avec plus ou moins de succès. C’est notamment le cas de l’Ougandaise Stacey Gillian Abe (Galerie Unit London) et ses portraits de femme indigo relevés de fines broderies.

Même chose chez Giana de Dier (Galerie Krystel Ann Art), artiste née en 1980 au Panama, qui à travers ses collages, rend hommage aux Afro-Caribéens employés à la construction du Canal de Panama, au début du XXe siècle. Souvent, pour ne pas dire la plupart du temps, le corps représenté est politique. Il raconte une histoire d’oppression – raciale, patriarcale – et s’affirme dans toute sa résilience.

Sankara, Fela, Mandela, Nkrumah…

Avec sa série Icons in the White House, le Nigérian Ayogu Kingsley (né en 1994) va même jusqu’à représenter de grandes figures de l’histoire africaine ou africaine-américaine comme Frantz Fanon, Chinua Achebe, Winnie Mandela, Malcolm X. Sur une même toile, il ose rassembler Thomas Sankara, Fela Anikulapo Kuti et Kwame Nkrumah. Une forme de célébration a posteriori de personnages unanimement célébrés qui n’a rien de révolutionnaire aujourd’hui.

Pastiche grinçant

D’autres artistes utilisent la peinture du corps pour jeter le trouble, interroger notre rapport au monde, à l’autre, à l’histoire. Dans un pastiche grinçant de la Leçon d’anatomie (1632) du Néerlandais Rembrandt, le Congolais Amani Bodo propose une Leçon d’anatomie sur la croissance de l’Afrique (galerie Primo Marella) représentant des chirurgiens blancs en train de disséquer une statuette africaine !

Chez The African Art Hub (TAAH), galerie en ligne, le Nigérian Ibrahim Bamidele reprend lui aussi des codes européens – ceux de l’icône sacrée – en intégrant des personnages albinos dans d’étranges scènes bibliques sur décor saturé de wax. Parfois, l’approche est plus douce, comme chez la Sud-Africaine Leila Rose Fanner qui représente des femmes à tête de fleurs dans des tableaux oniriques faisant la part belle à la nature et à la spiritualité (Faerie Tales Series, Galerie Carole Kvasnevski).

De manière assez surprenante, on notera que la peinture du corps ne donne lieu à aucune outrance ou provocation. La plupart du temps, il s’agit pour les artistes de s’affirmer en tant qu’individu, d’exiger dignité et reconnaissance. Le sexe ? La violence physique ? Alors qu’ils dominent notre présent, ils ne sont guère représentés ici. La foire 1-54 reste bien sage, voire politiquement correcte.

Au cœur de la lumière

Tant de corps rassemblés dans les allées de Somerset House font inévitablement passer les artistes qui travaillent l’abstraction pour des originaux. C’est notamment le cas du Marocain Amine El Gotaibi (MCC gallery, Marrakech) qui a disposé dans la cour du bâtiment douze structures métalliques géométriques, inspirées par la forme des graines de grenade, à l’intérieur desquelles il est possible d’entrer. Titré « Illuminate the light », l’œuvre s’illumine à la nuit tombée – autre façon d’aller à l’encontre des stéréotypes sur les « ténèbres », souvent accolés à l’image du continent.

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